dimanche 31 août 2014

Du temps de cerveau pour… une nouvelle gare en tuiles

Vous connaissez le Garamond, le Plantin ou le Didot, peut-être ? Et même si cela ne vous dit rien parce que vous êtes trop jeune, vous connaissez l’Helvetica, le Times ou le Verdana ? Non ? Ce sont tous des noms de polices de caractères, utilisés depuis l’aube des temps du savoir, lorsque l’imprimerie fut inventée, ou plus tard lorsque ce qu’ils appelaient le « numérique » apparut, les pauvres. A l’époque, quand on écrivait un texte et qu’on voulait l’afficher, sur du papier ou un écran physique, on utilisait l’une de ces « polices » ou leurs cousines.

Mais ça c’était avant la naissance d’Annabelle.

Qui songerait à utiliser aujourd’hui, la seule époque réellement moderne, un autre moyen d’écrire qu’avec Annabelle ? Qui pourrait se contenter de ces styles figés et sans âme pour représenter la pensée de ceux qui écrivent des textes ? Aujourd’hui seuls certains musées gardent des traces de ces objets préannabelliens et seuls certains collectionneurs sont capables de nous en montrer l’inefficacité hallucinante. La collection Rinaldo en est l’un des plus beaux exemples. Après plusieurs salles consacrées aux empreintes d’animaux dans la neige, le sable, l’eau ou l’air, on peut découvrir une salle sombre consacrée aux polices de caractères. Il s’agit de petits fragments évidemment, certains sur du papier, de la pierre ou des plaques de verres pixellisées. Aucune explication n’est nécessaire devant l’ineptie de ces « techniques » évidemment. Le simple fait de juxtaposer des fragments illisibles et laids avec la simple beauté de l’Annabelle serait un contresens grossier.

Mais il est un fait que l’Homme a vécu pendant des siècles avant de découvrir l’Annabelle. Il est bon de se le rappeler, de temps en temps et de mesurer ainsi la douleur de nos ancêtres, privés de sa beauté. Il est bon également de se souvenir de la création de l’Annabelle, de ce moment qui a changé à jamais l’Humanité. Aujourd’hui je vais vous raconter l’histoire réelle de l’invention de l’Annabelle. Pas l’Histoire officielle que vous avez tous appris à votre naissance. Non. L’Annabelle n’est pas apparue ce matin glorieux, venue de nulle part et se répandant à grande vitesse sur la planète. L’Annabelle n’a pas changé le monde en un jour. La vraie histoire est encore plus belle que cela.

Ce matin-là était gris comme le monde. C’était un matin ordinaire dans l’une des grandes villes du monde, à une époque où vous le savez les villes étaient encore séparées. A cette époque, tout le monde se battait contre tout le monde. Il y avait des guerres entre « pays » et villes, les enfants se battaient même dans les cours d’école et les Hommes essayaient toujours d’écraser leurs collègues au travail, en faisant mieux ou autrement. Cette histoire de « polices » de caractères en était une parfaire illustration. Chacun utilisait des « polices » privées différentes, certains les mélangeaient et tous les jours de nouvelles « polices » étaient créées. C’était comme si l’apparence des textes était plus importante que leur contenu. Il y avait même un ensemble d’Hommes dont le métier était de créer de nouvelles « polices » de caractères. Ce n’était pas des policiers ou des guerriers, mais ils devaient trouver toujours de nouveaux moyens pour enfermer la pensée dans de nouvelles structures.

Personne ne connait plus le nom de cet Homme en particulier. Appelons-le AAA. AAA avait un collègue que nous appellerons ZZZ. Alors que AAA créait des polices de caractères du matin au soir, ZZZ était un chercheur spécialisé dans la chimie. Ils se voyaient presque chaque soir autour d’un verre.

La veille de ce matin-là, ils avaient eu une petite dispute. Elles ne duraient pas longtemps en général mais elles n’en étaient pas moins très désagréables pour AAA - et pour ZZZ certainement aussi. Ils s’étaient quittés fâchés et AAA avait mal dormi. Ce matin-là, AAA s’était installé devant sa « machine » à produire les polices de caractères de très méchante humeur. Son collègue ne pouvait pas avoir raison ! Au bout de quelques minutes, AAA sut qu’il ne pourrait pas travailler sereinement et il préféra sortir pour se changer les idées. Il habitait près d’un grand parc rempli d’arbres - c’était avant qu’ils aient tous disparus pour devenir du papier. AAA décida de faire le grand tour du parc ce qui lui prendrait bien une heure, avant de retourner au travail. Il travaillerait plus tard le soir pour compenser, c’était tout.

AAA était à l’autre bout du parc quand il entendit une douce musique. Elle était faible, mais elle était si belle qu’AAA sursauta. Il s’arrêta net mais la musique avait disparu. Il ne voyait rien, le chemin était désert. Il recula prudemment d’un pas et la musique l’emplit à nouveau. Il ne voyait toujours rien. Mais dès qu’il essaya de bouger, la musique disparut. Il n’y avait qu’un point de musique dans le monde et il était dessus. Cette musique était trop belle pour qu’AAA bouge. Personne n’aurait pu bouger de ce micro-espace de beauté.

AAA resta ainsi un temps indéfini. Il écoutait la musique. Non. Il vibrait avec la musique. Il entendait au sens plein du mot la musique. C’était une vibration qui l’emplissait et qui s’accordait avec la moindre de ses pensées. Avec la moindre de ses émotions. AAA regarda partout autour de lui. Rien ne permettait de comprendre d’où venait la musique et pourquoi elle n’était perceptible que de ce point précis. Les arbres étaient calmes, quelques oiseaux volaient dans le ciel et le chemin était toujours désert. AAA baissa les yeux vers le sable du chemin. Il n’y avait rien de spécial sur le sol, ni animal ni vaisseau extra-terrestre.

AAA s’accroupit et prit une poignée de sable dans la main. Puis il respira un grand coup et fit un pas de côté. La musique s’arrêta. AAA revint rapidement à sa place, au sein de la musique. Il jeta le sable au loin puis se pencha pour ramasser une autre poignée. Il recommença plusieurs fois, jusqu’à ce que son pas de côté le conserve dans la musique. Il fit un autre pas. Puis un autre. La musique était toujours avec lui. AAA sut alors que la musique était maintenant dans sa main. Il cria de joie, seul dans ce matin gris. Comme un bébé qui vient de nâitre. Comme le premier Homme qui était touché par la beauté.

AAA marcha lentement sur le chemin, la musique dans sa main et la main devant lui. Il s’arrêta au kiosque près du lac et y demanda un sac en plastique dans lequel il mit avec précaution sa poignée de sable. La jeune femme qui tenait le kiosque le regarda bizarrement pendant qu’il remplissait le sac. AAA lui montra le sac plein de sable. La jeune femme était un peu myope et elle dut se rapprocher. AAA sentit surgir sa présence quand elle fut assez près pour entendre la musique. Ils se regardèrent dans les yeux. Aucun mot ne fut échangé naturellement, les enfants. Comme aujourd’hui. Mais ils furent surpris de se comprendre si bien sans rien dire. Et pourtant chacun des deux sut qu’ils venaient de se parler. Dans la musique. Par la musique. Leurs yeux ne purent se quitter. Et Annabelle, puisque c’était le nom de la jeune femme, eut le premier geste.

Annabelle prit la main d’AAA dans la sienne et secoua doucement le sac. Tous les deux avaient compris qu’un grain de sable était à l’origine de la musique. Mais Annabelle avait compris la première que ce grain de sable donnait la musique à tout ce qui le touchait. En quelques instants Annabelle avait tellement secoué le sac que chacun des grains qu’il contenait était devenu un grain de musique. Le sac lui-même était devenu musique, et AAA et Annabelle aussi.

AAA était resté comme paralysé. Mais il s’ébroua brutalement. En face de lui était la plus belle des femmes qu’il eut jamais vue. Il pouvait lire dans ses pensées comme si elles étaient écrites en lettre de Beau directement dans sa tête. Et toutes ces lettres ressemblaient à Annabelle. Leurs courbes étaient vivantes, fluides, d’une élégance unique - pour l’époque. Chacune des lettres de la pensée d’Annabelle était la Beauté même. Toutes différentes. Chaque lettre un mot, une pensée, une histoire, l’Histoire.

AAA regarda Annabelle dans les yeux. Annabelle ne bougeait pas. AAA tira légèrement sur le sac et la main d’Annabelle s’ouvrit. AAA lui versa quelques grains dans la main et lui sourit puis il s’éloigna avec le sac. AAA ne revit jamais Annabelle et personne ne sait ce qu’elle est devenue. Elle s’est fondue dans la masse évidemment, comme tout le monde, mais le mystère de la première agitatrice reste entier. AAA, dans ses mémoires, dit ne jamais l’avoir revue. Quand il rentra à son travail avec son sac de sable, ZZZ l’attendait. Il était venu s’excuser pour la soirée d’hier. Mais AAA ne lui laissa pas le temps de parler. Il le toucha simplement et ZZZ comprit, grâce à Annabelle. En quelques minutes ils se mirent au travail. AAA peaufina un texte écrit en Annabelle qui expliquait la beauté du monde et l’importance de construire ensemble sa musique, chacun dans sa liberté. ZZZ le grava dans un des grains de sable, en Annabelle évidemment. Puis ils partirent tous les deux au bord du grand fleuve qui bordait la ville et jetèrent le sable dans l’eau.

Annabelle mit si peu de temps à se répandre sur la planète que le soir même des millions d’Hommes étaient déjà touchés par sa beauté. En moins de deux jours, tous étaient atteints et tous se parlaient en Annabelle. Chaque texte précédemment écrit avec ces « polices » de caractères était immédiatement devenu un texte en Annabelle. AAA fut oublié de tous. Sauf de ZZZ évidemment. Les deux Hommes se mirent à chercher la jeune femme qui avait donné son nom à la Beauté, mais ils ne la trouvèrent jamais, dit la légende. Il n’y avait d’ailleurs jamais eu de kiosque dans le parc à cet endroit, avait-on répondu à AAA.

samedi 30 août 2014

Tractations en coulisses en Europe

Aujourd’hui, Conseil européen (avec les chefs d’Etat) extraordinaire, pour avancer sur les nominations aux postes clés. On dit tout et son contraire, et de toutes façons seul le résultat compte. En Belgique on dit ça par exemple, en France ceci, en Italie cela… et on pourrait continuer longtemps.

Le président de la Commission européenne est connu depuis le début de l’été, c’est le luxembourgeois Juncker.

La présidence du Conseil européen est à pourvoir : c’est forcément un chef d’Etat : le favori est le polonais mais la danoise est près. Pour le Haut représentant à la politique étrangère et la sécurité commune, une italienne est favorite. Un espagnol serait à la tête de l’Eurogroupe. La tradition est que ces postes ne soient pas pour les « grands » pays. Hum.

Tout ça va faire l’objet de plein de rendez-vous secrets avant le conseil en fin d’après-midi. Parmi les rendez-vous secrets, François reçoit publiquement les dirigeants européens socio-démocrates ce matin, avant un départ groupé pour Bruxelles… Ce n’est pas l’Internationale socialiste mais un lobby minoritaire qui essaie de s’organiser pour infléchir la politique économique libérale de l’Europe, portée par les allemands et les anglais principalement. Parmi ces dirigeants on retrouve la première ministre danoise citée plus haut. Il y a huit chefs de gouvernements présents dont François, mais aussi le président du Parlement européen Martin Schulz (allemand) et le vice-chancelier allemand. On peut d’ores et déjà être certain qu’Angela est ravie.

Borgen à l’Elysée - nouvelle saison

Il y a évidemment ces questions de nomination qui sont urgentes, mais aussi en sous main la politique économique et financière européenne. François veut (ou rêve de) l’adapter pour la France et pour les autres pays fragiles. C’est un bras de fer. Mais...

...Il y a plusieurs manières d’influencer :
- des rendez-vous secrets et efficaces en permanence, comme dans la diplomatie britannique
- des rodomontades publiques avec panache, comme le veut la tradition française
- du travail de techno-eurocrate en coulisses, comme savent le faire les cabinets de lobbying
- de l’affrontement réel et violent comme savent le faire tous les autocrates.

Laquelle est la meilleure, ici et maintenant ? François sauvera-t-il le soldat Moscovici ? Suspense...

vendredi 29 août 2014

Volcans : une nouvelle éruption à La Rochelle

Vous connaissiez l'éruption il y a quelques années du volcan au nom imprononçable d'Eyjafjöll.
Vous avez entendu parler de la nouvelle éruption islandaise, cette fois-ci c'est le volcan Bardarbunga  le plus grand d'Islande et on ne sait pas encore s'il va enfumer l'Europe et perturber plus le trafic européen qu'une grève d'Air France.
Vous allez bientôt entendre parler de l'éruption du volcan du Mont Tavurvur en Papouasie qui pollue l'Australie et jusqu'au Vanuatu.

Mais le pire est à venir. Ce week-end, les sismopolitologues prévoient l'éruption du volcan antivalls dans la paisible ville côtière de La Rochelle, en France.

D'ores et déjà la sécurité civile a mis en place un hôpital de campagne et un poste de secours (PS pour les experts), avec des médecins urgentistes spécialisés dans les crocs-en-jambe, les arrachages de dents, les vertiges de la haine et les retournements de vestes. Un périmètre de sécurité (PS pour les initiés) a été établi de façon à exclure certains ministres. Pour les protéger ou pour protéger les autres, ce n'est pas encore clair à l'heure matinale et royale où nous écrivons. Les eaux de La Rochelle sont moins pétillantes et calmantes que celles de Vals mais un avis de tempête a été émis par la police subaquatique (PS pour les marins). Enfin, M. Hamal, boucher halal de son état a stocké en prévision de la crise inévitable une quantité importante de porc salé (PS pour les gastronomes).

On attend des éjaculations précoces de fumées et de paroles dangereuses, ainsi que des éjections de socialistes, chauffés à rose. Comme le dit le proverbe du coin, une raffarinade comme on dit dans la région, "La Roche Elle Fume !".

Si vous pouvez, ne passez-pas par là. C'est dangereux. Comme endroit plus calme, vous avez par exemple le défilé pour le dieu Ganesh à Paris, dimanche. Notre reporter spécial a pu interviewer le dieu en exclusivité. Ganesh a répondu : "J'ai préféré rester à Paris entouré de mes nombreux admirateurs avec leurs noix de coco, que d'aller à La Rochelle. Il y a déjà trop d'éléphants là-bas et surtout trop d'éléphanteaux !".


jeudi 28 août 2014

Ferrero rocher

Aujourd'hui François recevait les ambassadeurs - et ambassadrices - de France. Dans le cadre de leur rencontre rituelle chaque année fin août, avant qu'ils ne repartent dans leur pays d'affectation, les ambassadeurs passent quelques jours à Paris pour faire leur shopping, échanger des tuyaux, discuter de grands sujets ensemble et entendre de la bouche du Chef de l'Etat et du Ministre Fabius leur feuille de route. Il y a parmi eux des anciens, des très vieux routards et des nouveaux arrivants. C'est un corps très secret et très protégé que celui des ambassadeurs. Les quelques personnalités externes qui en font partie ne restent jamais très longtemps en poste, comme Ruffin à Dakar, retourné à ses chers études littéraires par exemple.


C'est l'occasion de belles photos et d'un beau discours de François, puisque c'est lui le président en ce moment. A voir ici (et à lire aussi quand l'Elysée aura bien voulu le mettre en ligne). Rassurez-vous ls ambassadeurs écoutent plein d'autres discours plus ou moins stratégiques ou techniques avant de repartir. Chaque organisation importante essaye d'être représentée à cette conférence pour faire du lobbying.

Pour mémoire c'est un certain Alain Juppé, ministre des affaires étrangères d'un certain Balladur qui avait lancé l'idée.

François a surtout parlé des grandes crises du moment en commençant par le moyen orient, mais aussi l'Ukraine et l'Afrique. Il a parlé de l'Europe et de la future conférence internationale sur le climat à Paris fin 2015, et a même réussi à parler un peu de francophonie (vers la 41° minute de la vidéo), en citant le rapport Attali qui lui a été remis cette semaine sur la francophonie économique, et dont il espère faire un des sujets principaux du Sommet de Dakar. Mais tout ceci est maintenant résolument placé sous le chapitre "attractivité de la France" pour que notre économie se développe.

Mais finalement, peu de nouveautés. Les sujets internationaux sont de plus en plus complexes, même pour les "techniciens" du domaine. Ils passionnent de moins en moins les foules en France. Et le discours démontrant que la France se sert de sa diplomatie pour se développer plus ne semble pas toucher beaucoup de monde. Les médias s'en foutent. L'international reste cantonné aux faits divers, aux nombres de tués, aux drames et aux images de reporters courageux. Même sur un sujet comme Ebola, qui détruit certains pays d'Afrique, l'angle avec lequel les médias en parle est souvent "est-ce que ça peut venir chez nous ?"...

Puisque peu en parlent on peut se demander si l'objectif est atteint. Les ambassadeurs y trouvent certainement leur compte, surtout depuis que leur rôle de patron de la représentation française dans un pays s'est développé. Mais les médias et les citoyens de base ne savent pas vraiment ce qui s'y passe, les idées qui traînent et les sujets que lesquels il y a de quoi penser. L'image reste celle des rochers Ferrero de la pub, pas celle de forces de frappe pour promouvoir la France. D'une certaine manière, les protections dont s'est entouré petit à petit le corps des ambassadeurs l'ont éloigné des citoyens. Cela explique en grande partie le peu d'intérêt pour l'international, au-delà des crises.



Il parait qu'il y a des conférences des ambassadeurs plus réussies que d'autres, plus mobilisatrices. Pas pour tout le monde à la fois évidemment. Est-ce que celle-ci sera une des meilleures ? Elle n'en prend pas le chemin en tolus cas. C'est le troisième de François (et Fabius). Encore deux.

mercredi 27 août 2014

La francophonie économique, vraiment ?

Jacques, Attali, l'ineffable et indéboulonnable conseiller, a remis hier à François le rapport qui lui avait été demandé sur "La Francophonie Economique". J'ai lu ce rapport (pdf ici). Commentaires à chaud dans ce billet, puisqu'on aime bien la Francophonie ici.

- Le titre est aligné avec le concept de diplomatie économique défendu notamment par Fabius. Quoi faire pour que la diplomatie, et donc la Francophonie, profite à l'économie française. Même si ce n'est pas l'objectif unique de la francophonie, c'est un objectif acceptable. La France n'est pas le seul partenaire de la Francophonie, même si c'est le plus gros contributeur à sa partie officielle et institutionnelle. Il n'y a pas de raison de ne pas en profiter aussi. Le Canada par exemple impose presque tout le temps que les fonds canadiens soient réservés à des acteurs du pays, même quand ils sont au bénéfice de pays en développement.

- le titre est à double sens. Il s'agit également de rendre la francophonie plus économique, c'est-à-dire moins chère : être plus efficace (suivant les principes de la déclaration de Paris sur l'efficacité de l'aide) mais aussi pour le donateur ; être financée par d'autres moyens (dits innovants) que par l'argent public. En ce sens le rapport fourmille de propositions pour multiplier les partenariats avec des acteurs privés et associatifs classiques, au-delà des dinosaures parapublics existants.

- Jacques Attali use et abuse d'un nouveau terme "francophilophone" pour désigner à la fois les francophones et les francophiles, c'est-à-dire ceux qui aiment la langue française et ceux qui aiment la France, où qu'ils soient, dans un pays francophone, un pays francophile, une diaspora, ou isolés. Tous les militants francophones connaissent bien l'ambiguité entre francophonie et francophilie. La confusion entre les deux n'existe pas dans la tête des acteurs français (comme Attali) mais elle est très vivace chez les autres francophones non français. Moi j'aurais proposé d'autres termes ;
- francophilouphone
- francophonouphile
ou mieux
-francophonophile (ceux qui aiment la francophonie)
M'enfin, on ne m'a pas demandé mon avis ;)

- Le pari est donc de dire que le partage d'une langue est un atout pour développer les échanges économiques, mais que cela ne se fait pas tout seul. Il faut l'accompagner. Certains prédisent en effet une forte croissance des francophones, essentiellement grâce à la poussée démographique en Afrique. Encore faut-il former cette population au français (ou en français ce qui n'est pas la même chose). Et si aucun moyen supplémentaire n'est mis pour cela, les jeunes seront formés autrement : il ne manque pas d'autres coopérations internationales qui se feront un plaisir d'agir, et les langues africaines se développeront. Attali dit donc simplement que la France doit tirer parti de ce réservoir de richesse et s'en donner les moyens. En termes économiques, on appelle cela de l'investissement.

Parmi les propositions, j'ai noté celles-ci pour l'enseignement supérieur :

- n°6 : promouvoir les FLOTS (MOOC en français, bien que CLOM soit un autre acronyme possible pour les ayatollahs de la langue), c'est à dire les cours en ligne en français, ouverts à tous.
- n°14 : renforcer les partenariats entre les écoles techniques supérieurs spécialisées dans divers secteurs et les filières de prestige : commerce, médecine, ingénierie
- n°15 : avoir enfin des visas pour les boursiers francophilophones (?)
- n°30 : développer communauté scientifique francophone et développer les brevets au sein de cette communauté
- n°31 : créer des partenariats public-privé pour la recherche en Afrique (si les entreprises le veulent bien)
- n°44 : créer un portail numérique pour tous les étudiants francophilophones (décidément j'ai du mal à taper ce mot) du monde, en français.

Dans les autres domaines on trouve en vrac :

- n°53 : la plus "politique" des propositions qui vise à transformer l'OIF en UEF : passer d'un Sommet mou de chefs d'Etats à une Union économique francophone, comme les unions régionales (Europe, Afrique par exemple). Pas simple et assez provocateur évidemment ! A quelques mois du Sommet de la Francophonie, c'est à suivre avec intérêt !
- n°5 : rapprocher le CNED du Ministère de Fabius (qui décidément est en train de tout rassembler autour de lui).
- n°12 : enseigner la musique francophone ! (Do Ré Mi Fa Sol La Si Do au lieu de ABCDEFG ?)
- n°16 : créer un Netflix francophone (avec Belphégor, les Rois maudits et Nounours ?)
- n°36 : relancer le label "origine France garantie"... Un fromage pour Montebourg ?
- n°38 : créer un forum des affaires francophilophones (si quelqu'un arrive à le prononcer)

Que du bonheur donc à lire cette prose... Qu'en fera le nouveau gouvernement ? François en parlera-t-il devant les ambassadeurs de France réunis à Paris en cette fin de semaine comme tous les ans ?

Quel suspense !

mardi 26 août 2014

Attention, un gouvernement peut en cacher un autre

Bon, pendant que tous les journalistes font le pied de grue dans les cours et les couloirs des palais de la République, en attendant le nouveau gouvernement, si on parlait de ça justement ?

La composition n'est pas encore connue à c'te heure, mais elle arrivera bien assez tôt pour les passations de pouvoir et le 20 heures. On entend tout et son contraire évidemment. Elle sera postée ici comme ailleurs dès qu'elle sera connue, avec un focus sur les nouveaux. Bien prononcer le S à la fin de focus pour éviter les problèmes avec les esprits mal embouchés.

La ligne du gouvernement va donc être resserrée, franchement social-démocrate, et moins alambiquée. Ca nous promet des manifs dans la rue et des empoignades au Parlement. Mélenchon qui voulait se retirer a déjà appelé à une manif aujourd'hui à 18h30. Il ne faudrait pas que quelqu'un le double ! Des volontaires pour une manif à 17h30 ? à 16h30 ? Ce matin ou hier ? Comme disait à peu près Alphonse Allais dans un texte célèbre : "l'enterrement aura lieu samedi matin. S'il pleut le matin il aura lieu l'après-midi. S'il pleut l'après-midi il aura lieu le matin".

La gauche du centre, le centre-gauche, l'aile droite du PS et les écolos sans ligne vont donc discuter et utiliser leurs influences croisées pour un paquet de réforme à la grecque ou à l'italienne, contre une droite remontée par principe et une gauche de la gauche qui veut le grand soir. C'est super. Comme ça la droite pourra revenir au pouvoir et montrer qu'elle est de gauche. Ne trouvez-vous pas bizarre que beaucoup de socialistes disent que l'ennemi c'est le FN, en oubliant complètement l'UMP et la droite classique ? C'est comme s'ils refusaient la réalité. L'ennemi de la gauche c'est la droite (et réciproquement). Tout est simple en France.

C'est la rentrée, il est donc temps de faire des courses. En vrac, prévoyez d'achetez :
- un parapluie et un imperméable pour le temps pourri et les nombreuses manifs
- un coussin à mettre dans le dos pour faire le dos rond avec les réformes
- une blouse pour votre nouveau métier, une fois que vous serez viré : il parait qu'il y a de plus en plus de vieux et que plein de nouveaux métiers sont à lancer autour de la "nostalgie". Créez votre auto-entreprise, c'est la mode, c'est quasiment le seul secteur en croissance en ce moment.
- un sac de riz pour l'hiver
- des bonbons pour vous consoler, car que ferait-on sans bonbons ?

Et le gouvernement alors ? Ca traîne ! On parle de ministres ayant un comportement irréprochable par rapport à la ligne officielle. Je vous rappelle qu'il ne faut pas confondre personnalité et comportement. C'est assez difficile de changer la personnalité de quelqu'un, encore plus d'un politique "âgé". Par contre, il est plus facile de changer des comportements et de les adapter à une situation nouvelle. Et les convictions là-dedans ? Conviction et action, vous avez quatre heures, le sujet de philo auquel vous avez échappé cette année pour la session de juin.

Finalement un ministre ça sert à quoi ? La ligne politique (molle ou dure) est définie à l'Elysée avec un Premier ministre qui aide à la préciser et qui l'applique. Les ministres sont là pour exister, s'ils suivent parfaitement la ligne politique, et pour endormir la faction qu'ils représentent. En fait c'est à la marge qu'un bon ministre agit. Il réussit à ajouter à la ligne politique centrale des harmoniques compatibles. De là à se croire irremplaçable ou indéboulonnable... Exemple avec Cécile Duflot et sa loi sur l'immobilier qui ne supporterait pas qu'on la détricote même un peu. Pourtant, tels Pénélope et sa tapisserie, les gouvernements tricotent et détricotent en fonction de la situation. C'est donc la ligne qui compte, pas les ministres. Et si la ligne économique se durcit, ils seront tous solidaires... C'est dur de gouverner !

Presque 18h…

On se rapproche. Finalement peu de rumeurs aujourd’hui. Car les ministres pèsent moins que la ligne HV. Le grand parti international et de taille mondiale qu’est le PRG aura des ministres. C’est pas d’eux qu’on disait qu’ils pouvaient faire leur congrès dans une cabine téléphonique, il s’agissait d’autres radicaux… mais c’est pas loin. Heureusement pour eux ils ont 17 députés ;)

Le soleil brille en tous cas en cette fin d’après-midi. Finie la pluie depuis l’annonce du remaniement. C’est certainement l’annonce la plus importante de l’après-midi.


Sinon, il y a effectivement un nouveau gouvernement, à découvrir partout ou ici. On notera de belles promotions :
- NVB hérite de l’éducation et aussi de Geneviève Fiorasso pour l’enseignement supérieur et de la recherche
- Fleur Pellerin à la culture et à la communication
- Emmanuel Macron, ancien financier et ancien conseiller économique de François remplace… Montebourg !

PS : Le rapport Attali sur la « francophonie économique » est paru aujourd’hui. A lire, ici. On y reviendra évidemment.

lundi 25 août 2014

Une rentrée en fanfare plus tôt que prévu

Ca tombe bien, moi aussi je suis rentré ce matin. Je suis à Paris, donc disponible pour être ministre. On peut me joindre facilement via ce blog. Merci.

Après la sortie préméditée et avec circonstances aggravantes de Montebourg (et de Hamon) contre la ligne économique du gouvernement, le Premier Ministre a présenté la démission de son gouvernement ce matin. Manuel Valls a été renommé premier ministre dans la foulée par François. Le nouveau gouvernement sera connu au plus tard mardi après-midi - pour le 20 heures de France 2 ou de TF1 - avec une première réunion du Conseil des nouveaux ministres mercredi.

La fête de la rose a donc surtout permis de planter des épines dans le pied de Montebourg. Enfin libre, il va redevenir un champion de ce qu'il fait le mieux : lui-même. Les petits frondeurs viennent de trouver leur Thierry ! On peut parier sur un gouvernement resserré avec des "hollandistes" fidèles pour passer le cap de cette année déjà annoncée comme socialement délicate. Les ministres tièdes vont disparaître et le signal envoyé est simple : le petit doigt sur la couture du pantalon ou de la jupe ! Un peu d'ouverture ne ferait pas de mal, mais chaque ministre extraterrestre serait automatiquement exclu par son parti, séance tenante. Certains sont prêts à risquer le coup.

Les analystes vont se déchaîner. Les journalistes aussi. Il ne manquera personne aux micros des médias. C'est bien François qui fixe le rythme de la rentrée ! On rappellera à tous les politiques qu'ils doivent vérifier que leur téléphone est chargé et connecté. Comme à chaque changement de gouvernement, il est utile de suivre nos conseils. Lisez-les utilement ici. C'était en mai 2012, mais ils restent valables. Ces conseils en ont aidé plus d'un !

Le pouvoir divise, quel qu'il soit. Certains croient qu'il rassemble autour d'un chef ou d'une ligne, mais en fait le pouvoir ne peut rassembler que si la population concernée partage de manière volontaire des objectifs simples, et est consciente de cela. Le jeu des alliances est ce qui caractérise la plupart des pouvoirs modernes. Et les alliances sont par définition malléables et volatiles, chaque baron étant persuadé d'avoir raison. Un pouvoir autocratique peut faire illusion quelque temps. Une succession de guérillas (ou de frondes) politiques aussi. Mais un équilibre durable n'arrive pas souvent. François n'a pas encore réussi à le créer autour de sa ligne. Pourtant, bizarrement, on sent des signes qui vont dans ce sens. Le ballet des égos politiques a du mal à accepter ce virage. Au PS notamment, les batailles internes prennent le dessus comme à l'UMP. Et il ne s'agit pas que d'une bataille social-démocratie contre aile de gauche.

Le pouvoir crée des divisions, car il y a ceux qui l'ont, ceux qui voudraient l'avoir (à la place des premiers), ceux qui sont attirés comme des moucherons opportunistes par sa lumière, ceux qui le subissent quel qu'il soit, ceux qui font avec et ceux qui le combattent : par principe, par foi, par doctrine, par intérêt ou par conviction. Un gouvernement resserré et de combat autour d'une ligne unique, c'est du rarement vu. Pas facile à faire, avec tous ces éléphants qui ont donné, pour certains, leur dernière représentation la semaine passée.

Est-ce Valls ou Montebourg ?

Question : François lit-il mon blog et s'en inspire-t-il ? (Question mégalo évidemment, puisqu'on parle de pouvoir et de médias ;) il n'y a pas de raison de s'en priver : on appelle cela la contagion du pouvoir.

En tous cas, ce soir, pour les célébration censées être unitaires des 70 ans de la Libération de Paris, et donc du Général de Gaulle qui a joué ce jour-là une carte savamment préparée et un tantinet mégalo, on se demande qui représentera l'Etat ? François et son nouveau premier ministre y seront. Mais les ministres ? Hum... Ca tombe mal, non ? Euh, pas si mal que ça en fait !

A suivre donc dans vos médias favoris pour 48 heures de commentaires vides sur les ministrables, les ex-ministres et les nouveaux; qu'ils soient gagnants, perdants ou ... Placé ?

dimanche 24 août 2014

Du temps de cerveau pour... Une nouvelle gare à Sète

Edmond en avait marre du métier de vendeur itinérant. Il le pratiquait depuis tant d'années qu'il connaissait pratiquement toute la France, ses hôtels, ses bordels, ses bars paumés pour VRP sans ambition.

Il avait vendu de tout, mais principalement de l'inutile. Des produits fabriqués uniquement pour être vendus à des clients crédules. Et cher. Car un produit pas cher était unanimement considéré comme sans valeur. L'astuce était de le faire payer en plusieurs fois avec des clauses de crédit en tout petit. En fait Edmond vendait du crédit.

Edmond connaissait toutes les techniques de vente classiques et même celles qui frisaient l'arnaque. Du pied-dans-la-porte au piège-abscons en passant par le toucher-de-bras, Edmond était devenu un expert. Il avait même été interviewé par des chercheurs qui en avaient fait un livre.

Edmond était fatigué. Il savait que cette tournée était la dernière mais il avait quand même du mal à aller jusqu'au bout. Il ne savait pas exactement ce qu'il vendait cette fois, mais ça marchait assez bien. Comme d'habitude. Le seul problème était que sa voiture était tombée en panne. Il n'allait pas en racheter une pour quelques semaines puisqu'une voiture ne lui servirait plus à rien ensuite. Il avait donc décidé de prendre le train, un peu aléatoirement.

Ce soir-là il avait pris un train pour Sète et était descendu sur un quai désert. Il faut dire qu'un orage violent venait d'éclater. Edmond se réfugia sous un abri tout petit. Il y avait juste assez de place au sec pour lui et ses deux valises : la sienne et celle des machins qu'il vendait.

Il aimait bien le bordel de Sète et son bar bien chaud. Pas trop loin de la gare en plus. Mais pour le moment il devait attendre que la pluie s'arrête. Edmond alluma une cigarette et regarda autour de lui. La gare était vraiment vide et sombre. Un moment il se demanda s'il était bien descendu au bon arrêt. Puis il décida de s'en foutre. De toutes façons il y aurait bien un hôtel à côté de la gare. Et des couillons pour acheter ses trucs. Il n'arrivait même pas à voir la pancarte au milieu du quai, tellement le rideau de pluie était épais et scintillant.

Quand Edmond vit la silhouette approcher, il pensa que c'était un cheminot venu voir si tout allait bien. Puis il devina des formes féminines. Il y avait aussi des cheminotes, pensa-t-il... Puis il vit mieux la femme approcher. Elle était en robe de soirée et parée de bijoux. Elle ne semblait pas remarquer la pluie. Ses cheveux non plus d'ailleurs puisqu'elle arborait une superbe coiffure qui n'aurait pas dû résister aux torrents d'eau qui tombaient du ciel avec un bruit d'enfer. Edmond comprit que la femme venait vers lui et il essaya de se serrer dans un coin de son petit purgatoire, mais il savait qu'il n'y aurait pas de place pour eux deux.

Lorsque la femme arriva devant son abri, Edmond put l'admirer en totalité. Il n'aurait pas su la décrire. Elle était tout simplement parfaite, comme un matin d'été quand on a vingt ans et qu'on se réveille à côté de l'amour de sa vie. Edmond remarqua à peine que sa robe était quasi transparente. La femme n'était absolument pas mouillée. Il ouvrit la bouche, mais elle lui mit un doigt sur les lèvres.

Edmond recula. La femme entra dans la chambre, referma la porte et alluma le chandelier près du lit. Puis elle se déshabilla lentement. Edmond se retrouva nu en quelques instants. Elle l'attira sur le lit. Edmond ne se souvint plus de rien après, seulement que c'était la meilleure nuit qu'il eut jamais passée.

Lorsqu'il se réveilla, c'était encore la nuit. La pluie avait cessé et le ciel était plein d'étoiles comme souvent après un orage dans le midi. Edmond était seul sous son abri, avec ses deux valises.

Il avait rêvé, se dit-il. Un beau rêve ma foi, pensa-t-il en souriant. Il décida de se lever et de trouver un hôtel pour le reste de la nuit. Mais il s'arrêta bien vite. L'une de ses deux valises était étrangement légère. C'était la valise des trucs à vendre. Un peu inquiet il l'ouvrit. Elle était effectivement vide. Sauf un petit bout de papier avec une empreinte de lèvres. Il connaissait ces lèvres. Il prit le papier et posa ses lèvres sur celles de l'inconnue. Puis il referma la valise et rejoignit la sortie. Il ne se souvenait du prix auquel il avait vendu sa marchandise, mais ce n'était pas grave. La nuit avait été merveilleuse.

C'était encore la nuit. Il n'aurait jamais dû traverser en pleine voie. Mais la nuit tous les trains sont gris. Lorsqu'on retrouva son corps le matin suivant, personne ne put l'identifier. Une des deux valises était vide et l'autre pleine de vêtements banals. On l'enterra dans le petit cimetière sur la plage à côté. Personne ne comprit jamais pourquoi ni comment cet homme était arrivé là, au milieu de nulle part, à côté d'un abri de chantier en pleine nature. La vieille comtesse décatie qui habitait la somptueuse villa à quelques dizaines de mètres n'avait rien entendu. Elle fut pourtant la seule à l'accompagner dans sa dernière demeure. Elle aimait bien les représentants de commerce. Et celui-ci vendait des machins intéressants. Pas comme celui d'avant !

samedi 23 août 2014

C'est la fin des vacances (pour moi), ne dramontisons pas

Bientôt le retour à Paris pour moi et des milliers d'autres moutons. C'est bien les vacances quand même quand on peut. Quand on veut se mettre en vacances aussi. Ca donne des forces pour tout le reste.

Alors, avant une dernière partie de pêche, juste quelques images du Cap du Dramont. Belle petite randonnée si l'on ne choisit l'heure la plus chaude, de toutes façons réservée à la sieste. Le Dramont c'est un des lieux phares du débarquement de Provence, mais c'est aussi un très beau cap de roche rouge, en plein massif de l'Estérel. Des couleurs plein la vue, avant la grisaille de la ville et de son ciel terne. L'été c'est la couleur. D'ailleurs la vie c'est la couleur aussi, non ? Donc la vie c'est l'été.

 Petite vue d'en haut, vers le sud. Au premier plan une petite crique ronde avec une belle plage et un bon restaurant, où déguster une petite friture par exemple

Carte postale typique, mais réelle

Le sentier principal est balisé avec des "flashcodes" apposés sur certains rochers, et celui-ci, en haut, qu'on dirait dessiné directement dans les arbres

 Sans commentaires. La beauté se suffit à elle-même

Le sémaphore, un peu plus loin et plus haut. On y revient dans quelques instants

 Terre, mer, ciel

Crique

A propos du sémaphore, il est en activité et dépend de la marine nationale. On peut en faire le tour un êu en contrebas, mais impossible d'y entrer. Comme vous le voyez, c'est un terrain militaire avec des secrets bien gardés et déguisés en table de ping-pong pour que les touristes chinois ne voient rien
L'île d'Or avec sa tour carrée qui inspira dit-on Hergé pour son Île Noire. Propriété privée. 
Mais la vue est à tout le monde ;)

Vers le Nord. La plage du Dramont, pour le débarquement du 15 août, plus loin Boulouris et au bout de la pointe le Lion de mer. Derrière ? Saint-Tropez

Ah zut, encore un beau paysage...

 C'est lassant, non ?... Non !

Un mur d'escalade, à manger (avez-vous vu la cloche ?) 

 Vu d'en bas, le même...

vendredi 22 août 2014

MélEnChonEnAlsace

Il semblerait que ce dimanche notre cher Mélenchon annonce se retirer de la codirection du Front de gauche, après avoir dit qu'il était fatigué dès juillet. C'est tout sauf une retraite. Il reste député européen, à Strasbourg en Alsace(-Lorraine).

L'année a été mauvaise pour le Front de gauche, désuni entre Parti de Mélenchon et Parti communiste à plusieurs occasions élections, et qui n'a pas trouvé d'allié, avec des Verts particulièrement inconsistants et sans ligne directrice. Les sénatoriales étant bientôt derrière nous et les futures régionales étant lointaines, c'est un bon moment pour prendre de la hauteur, penser, influencer de loin, reconstruire son image et sa popularité. On peut certainement compter sur lui pour faire parler de sa personne de manière encore plus imprévisible. Mais le Front de Gauche tel qu'il est aujourd'hui a des soucis à se faire. Une petite traversée du désert ?

Imaginons un instant que les leaders qui ont échoué se retirent de la vie publique (provisoirement). Qu'est-ce que ça donnerait ? Il n'y aurait plus grand monde qui resterait ! A priori pour 2014 il ne resterait que Marine Le Pen !!! Belle France, non ?

Conclusion, pour que la vie politique soit saine et existe en France, il faut qu'elle soit dirigée par des losers qui ont échoué. Edifiant, non ? Non ! Logique tout simplement. Et très rassurant pour les hommes et les femmes politiques qui savent que c'est un beau métier qu'on peut garder longtemps. Quelques faux politiques ne sont jamais revenus : trop de casseroles judiciaires aux fesses en général, ou ils étaient de faux politiques qui retournaient à leur cher métier plus lucratif, de médecin à consultant. Ke laisse les avocats de côté car c'est une population qui a toujours su jouer sur les deux tableaux. Depuis que Sarkozy est redevenu simple avocat par exemple, le chiffre d'affaires de son cabinet a explosé. Veut-il vraiment reprendre le pouvoir ? (Oui, évidemment, je blaguais).

De toutes façons, chaque homme politique qui s'est retiré à un moment donné est revenu dès qu'il le pouvait, à quelques exceptions près, bien trop rares. Regardez par exemple Sarkozy et Juppé qui reviennent tous les deux à l'UMP...  Regardez Cécile Duflot ou Bayrou...

Ceux qui aiment les grandes phrases assénées avec force et déclamées avec gouaille se délecteront donc du discours de Mélenchon dimanche. Je n'ai pas saisi à quelle heure c'était, mais j'espère que c'est en même temps que la messe. Un bon sermon n'a jamais fait de mal à personne.

Son grand moment !

jeudi 21 août 2014

Des verts blets

Un oxymore ? Les fruits sont soit trop verts soit trop mûrs à en devenir blets.
Mais la Nature est simple, la politique pas du tout.
Les écolos réussissent à être les deux de temps en temps et c'est le cas en ce moment.
Une des crises de croissance de ce non-mouvement, à coup d'égos surdimensionnés et de réactions tripales (ou tribales ?)... A force de croître, on ne sait plus si l'on grandit en taille, en respect, en force ou simplement en infatuation et en bulle d'air comme la grenouille qui voulait se faire aussi grosse que le boeuf. Les écolos politiques en ce moments sont trop jeunes et trop blets à la fois. Ils ne sont donc pas attirants sur le marché.

C'est le début des universités d'été avec les Verts. Les deux femmes leaders du mouvement rivalisent de déclarations fortes, anti-gouvernement et anti-hollande puisque c'est la mode tendance en cette fin d'été. C'en est risible. C'est en tous cas bien loin des fondamentaux des écolos. Depuis que l'écologie est devenue officiellement politique et a vocation à diriger le pays, ou du moins à le codiriger, le problème est de fixer une ligne politique.

La ligne officielle des écologistes doit répondre à des contraintes simples :
- être de gauche, et plutôt ) la gauche de la gauche pour ne pas laisser le front de gauche marquer le but à leur place
- être une force d'appoint à la gauche qui gouverne à un moment donné, même si cette gauche est plutôt social-démocrate donc à la droite de la gauche ou à la gauche de la droite
- défendre des principes simples et écologistes sur la Nature, le participatif, le citoyen, le local, l'économie alternative (à quoi ?)
- assurer une politique de long terme car l'écologie c'est le long terme, plus que pour les autres courants, donc s'installer durablement au pouvoir même quand on est contre
- gueuler bien fort, en dehors du gouvernement si possible car c'est plus facile
- mettre en avant des personnalités fortes qui cachent la forêt des militants honnêtes assis sur les banc publics des batailles quotidiennes pour une meilleure qualité de vie
- apprendre la dialectique qui permet de dire tout et son contraire suivant les personnes à qui on parle, car toute politique écologique déplaît à certains et tombe facilement dans le très local : NIMBY, Not in my backyard, pas chez moi !

Evidemment ces contraintes sont délicates à satisfaire toutes à la fois. Et beaucoup de militants ou de sympathisants des verts s'en sont détournés à cause justement de l'impossibilité pour les dirigeants verts successifs de réaliser la synthèse honnête d'une politique écologiste. Il y a pourtant une place possible pour eux, même si aujourd'hui ils ne sont plus les alliés du PS, à cause de leur aversion affichée pour Hollande et Valls, officiellement, et à  cause de leurs ambitions refoulées en réalité.

Il faut donc s'attendre à des déclarations fracassantes, puisque c'est une des seules façons de faire parler de soi ;) Heureusement, elles seront oubliées aussi vite qu'elles se seront évaporées dans l'air pollué. Les actions restent, elles. Mais pour cela, il faut accepter de gouverner et donc le compromis.

PS (si j'ose dire), Paris brûle-t-il, c'est ce soir et c'est France 3 qui s'y colle ;)

PPS François pendant ce temps est parti comme prévu pour l'océan Indien. Sommet régional à venir. On en reparlera.

mercredi 20 août 2014

Premier cirque des ministres de l'année

C'est mercredi, journée des enfants (Ah zut ils sont encore en vacances pour presque deux semaines !) et journée des ministres puisque c'est leur premier conseil de l'année (scolaire). Vous avez noté d'ailleurs qu'on parle toujours de la rentrée en septembre et jamais en janvier. Le vrai début de l'année c'est en septembre. Nous sommes tous de grands enfants !

Notre reporter spécial et masqué a réussi à s'introduire dans le salle du Conseil des ministres et nous en a rapporté un reportage photo que je vous commenterai brièvement : le choc des photos, vous savez... Les photos sont floues parce que c'est une caméra cachée et que ça doit être flou sinon c'est pas drôle. Mais l'ambiance y est. Mettez un peu de musique de Nino Rota en fond et c'est parti.

 On commence par la salle du Conseil encore vide avant l'arrivée des ministres.
Impressionnant non ? Les grilles sont pour tenir les journalistes à l'écart

 Les ministres les plus féroces sont entrés les premiers 
et François a un peu de mal à les calmer

 Le ministre des relations avec le parlement gueule que ça va mal se passer

 Les ministres expérimentés l'écoutent goguenards

 Y'en a un qui a assez de couilles pour envoyer des SMS malgré l'interdiction

 Mais finalement François reprend la main... pour l'instant

 La ministre de la justice se lance dans un numéro d'équilibriste fort réussi

 Mais la grosse cavalerie des machos déboule et la renverse

François est encore obligé d'intervenir

Ségolène domine le Conseil et surveille tout. 
Aujourd'hui elle est habillée simplement en drapeau français

 Le ministre puni pour avoir envoyé des SMS a reçu un gage et a dû se déguiser 
Ca ne fait rire personne. L'atmosphère redevient studieuse

Quelques ministres aboient quand même pendant que la caravane (d'un prince saoudien) passe

Ségolène fait un discours renversant qui tape dans le mille

Mais la ministre de l'enseignement supérieur nous démontre comment gravir les échelons de la société grâce aux études supérieures. Elle n'est pas arrivée en haut de l'échelle (de Shanghai) mais elle jongle assez bien avec les mots

 Discours de Laurent Fabius, un des éléphants du PS

Vite rejoint par un autre éléphant, Manuel Valls

On sent une amitié profonde entre les deux hommes 

 Après l'effort, ils se rassoient un peu fatigués

C'est l'heure de la récréé et les ministres jouent un peu au ballon, car c'est un gouvernement de sportifs pour une conjoncture sportive

Le premier ministre conclut par un pied de nez impressionnant

Et c'est la sortie, avec la traditionnelle déclaration des ministres devant les journalistes libérés.

Voilà. J'espère que ce reportage vous a plu. Merci à la Piste aux Etoiles.

mardi 19 août 2014

Paris brûle-t-il ?

C'est aujourd'hui le début des cérémonies qui commémorent le 70° anniversaire de la libération de Paris par sa population. Si vous n'avez jamais vu le film Paris brûle-t-il vous devez le voir. Pas de souci il passera à la télé comme chaque année. Et vous chanterez la mélodie de la fin du film comme tous ceux qui l'ont entendue. Une mélodie joyeuse au rythme lent et décalé mais qui fait battre votre coeur et qui swingue comme un air américain et en même temps très parisien. Ca date de 1966 mais ça n'a pas vieilli...



Tout le monde ira de ses petites phrases entre maintenant et le 25 août date officielle. Chacun s'appropriera cette victoire. certains essayerons de la détourner à leur profit. Pourquoi pas, après tout ? Mais n'oublions pas qu'on parle ici d'une guerre, d'une bataille de rues et que des dizaines de plaques sont visibles aujourd'hui dans tout Paris pour commémorer la mort à cet endroit de tel ou tel résistant. Le détournement est toujours possible, et il est même nécessaire. Mais le respect doit l'accompagner. Respect pour ceux qui ont agi, à ce moment de l'Histoire - et à d'autres. Le fait que les policiers aient été parmi les premiers à agir à Paris et révélateur. En 1966, dans le film, on opposait gaullistes et communistes. Les deux ont presque disparu depuis. Mais les policiers sont restés. Et Valls, qui a fait le premier discours aujourd'hui est un peu resté ministre de l'intérieur en les célébrant ;)

C'est donc un dernier temps de commémoration pour ces 70 ans en 2014. Ca tombe bien et ça va accompagner la rentrée politique entre le premier conseil des ministres de demain matin et la vraie rentrée de lundi prochain. Les commémorations sont toujours intéressantes mais elles ne parle pas beaucoup de l'avenir, ni même du présent. Et ceux qui se battent pour une vie décente malgré la conjoncture sont obligés de penser plus à leur présent et à leur futur. L'abus de commémorations peut vite devenir contre-productif.

Certains adorent pourtant. Bientôt on pourra célébrer le retour de Sarkozy et la commémoration de son quinquennat glorieux, le plus merveilleux de tous les temps depuis Napoléon. Les bannières sont en train d'être préparées et les cérémonies vont se multiplier. Il reste quelques inconnues quand même : quels noms vont accompagner Sarkozy sur son ticket ? Maintenant qu'il est devenu un homme du passé (il est le seul à ne pas le savoir) il devrait au moins aider à faire émerger un droitillon capable de faire regagner la droite. Mais les candidats se bousculent au portillon. Est-ce que la France a choisi de vivre dans le passé, engluée dans ses propres célébrations et grandeurs révolues ? Est-ce que les médias ont choisi de ne parler que du passé et de l'éphémère présent ? L'analyse rétrospective est la plus facile à conduire. L'analyse prospective est plus délicate et nettement plus risquée !

Et à propos de photos, la réalité est toujours difficile à saisir. Ici c'est août 1944 plongé 
dans aujourd'hui, pas mai 1968.

lundi 18 août 2014

Lundi doux

Les hommes et les femmes politiques rentrent un peu, mais pas trop. Les universités d'été approchent mais pas encore. François est bientôt en partance pour l'océan Indien. Paris-plages est terminé. Et il fait à peu près beau partout. Bref, une mi-août qui continue à se dérouler avec aucune envie d'avancer vers la fin du mois.

Heureusement il y a un peu de sport : après une semaine d'athlétisme, voici une semaine de natation, tous deux au niveau de l'Europe. Le rugby féminin s'est terminé, au niveau mondial, et le foot franchouillard a redémarré avec son lot de violences habituelles. Le tennis américain aussi, sans violences a priori. Pas de quoi s'enthousiasmer.

Il y a dans l'air un je ne sais quoi de désabusé. Tranquille certitude du déclin, attente de moments pires, mais aussi carpe idem sur le quotidien tant qu'il est là. Tout le monde est d'accore pour dire que la machine est en panne, en France et un peu partout en Europe. Tout le monde veut la faire repartir. Mais les grandes déclarations à la Sarkozy sont oubliées. Pour le moment en tous cas, on attend la saison 2. L'enthousiasme n'est pas là et pourtant l'équation est simple : changer tout sans trop changer face à des corporatismes qui se vissent dans leurs acquis, desserrer les boulons pour permettre une croissance rêvée sans les resserrer ailleurs. Cette recherche de la croissance comme panacée dans une économie qui est basée sur une course effrénée vers le "Plus de..." est évidemment une illusion, mais tous tombent dans le panneau. Il est tellement plus facile de partager un gâteau quand il grandit : chacun peut regarder sa part croître sans trop regarder les autres. Alors qua quand le gâteau stagne ou rétrécit, c'est une vraie compétition. Comme si le gâteau pouvait continuer à croître éternellement, à crédit !

En Angleterre par exemple l'écart entre les plus hauts salaires (des patrons de grands groupes) et les plus bas (leurs ouvriers ou employés peu qualifiés) a triplé en cinq ans. Avant il était de 47 contre 1 ce qui n'est déjà pas si mal. Il est cette année de 143 contre 1. Ces patrons gagnent en deux jours ce que vous gagnez en un an. On comprend que les patrons n'osent pas trop en rajouter. En France, l'Université d'été du MEDEF est attendue le week-end prochain et ils hésitent encore entre un discours musclé et un autre plus conciliant. De toutes façons les atouts sont dans leurs mains, comme dans celles de leurs actionnaires.

La rentrée se prépare donc doucement pendant que vous êtes les doigts de pieds en éventail (à propos, avez-vous lu ma nouvelle d'hier ?)... Ne bougez surtout pas ! On risquerait de vous voir. La torpeur de cette fin de pause estivale est trompeuse. Les orages traditionnels du 15 août ne vont pas tarder. Alors, égoïstement, puisqu'il faut bien l'être de temps en temps (pas tout le temps surtout, hein ?), pensez à ceux qui sont dans le métro pendant que vous ne faites rien. C'est injuste, mais c'est doux.



Saurez-vous reconnaître celle qui est à Lyon ?

dimanche 17 août 2014

Du temps de cerveau pour... une nouvelle garantie sise

Gilbert regardait ses doigts de pieds. Il les admirait depuis une bonne dizaine de minutes. Il faut dire qu'avec la mer bleue en fond, les rochers rouges sur les côtés et le sable blanc en dessous, ses pieds bronzés ressortaient parfaitement. On aurait dit un tableau hyperréaliste. Gilbert était un grand amateur d'Art et cette composition le ravissait. Evidemment c'était l'élément central qui attirait le regard. Ses doigts de pieds étaient vraiment magnifiques et la plage un écrin idéal pour les mettre en valeur.

Tout se passait comme si le paysage et son corps entier n'avaient pour objectif que de servir la beauté unique de ses doigts de pieds. Gilbert pensa encore une fois qu'il avait de la chance. Porter la beauté sur soi était un don du ciel. Qu'il était dommage que si peu de gens sachent reconnaître la vraie perfection. Gilbert soupira. Du coin de l'oeil, sans quitter ses somptueux doigts de pieds du regard, il voyait quelques baigneurs et baigneuses, mais tous avaient l'air occupés à autre chose qu'à regarder ses doigts de pieds à lui. Gilbert savait bien que beaucoup de gens étaient incultes, mais il devait bien y en avoir quelques-uns sur la plage qui étaient sensibles à l'Art. Peut-être n'avaient-ils pas eu la chance de regarder déjà dans sa direction ? Peut-être ne savaient-ils pas que la perfection artistique était là, à quelques mètres d'eux ?

Gilbert aimait l'Art d'une manière non égoïste. Il n'était pas l'un de ces collectionneurs obsédés qui récupéraient partout des oeuvres pour leur seul plaisir intime. Gilbert aimait partager. Il savait que l'Art était fait pour être admiré par tous - en tous cas par ceux qui y étaient sensibles. Gilbert se désolait donc quand une oeuvre n'était pas admirée. Et cette vision de ses doigts de pieds si élégants était tellement intense pour lui qu'il eut soudain envie de la partager avec d'autres.

Mais comment faire ?

Si Gilbert bougeait, il allait forcément détruire la beauté du tableau qui s'offrait à ses yeux. Il était même trop loin de son téléphone pour l'attraper sans remuer. Une photo aurait été un pis-aller, mais il ne pouvait même pas se permettre d'en prendre une sans détruire l'Oeuvre. Il se retrouvait paradoxalement dans la position du scientifique qui ne peut observer la réalité sans la détruire, lui qui détestait la science sauf quand elle produisait des images artistiques. Gilbert sut alors qu'il devait appeler quelqu'un.

Mais qui et comment ?

Gilbert ne pouvait se permettre de crier à la cantonade. Ce n'était pas son genre. Il devait prendre un risque. Gilbert prit une grande inspiration (artistique évidemment) et détourna les yeux quelques secondes pour balayer la plage. Puis il revint bien vite à ses doigts de pieds chéris. Heureusement tout était pareil. Son tableau était encore là. Peut-être même encore plus beau. Ne pas l'avoir vu pendant trois ou quatre secondes l'avait sublimé dans sa mémoire. Gilbert retomba en extase devant ses doigts de pieds. Au bout de quelques minutes, il se souvint de ce qu'il avait vu autour de lui sur la plage. La seule personne qui lui paraissait digne d'admirer un tel chef d'oeuvre était une jeune femme, assez gironde et portant un élégant chapeau de paille. Elle était allongée à une dizaine de mètres de là, à côté d'un homme quelconque et même plutôt vulgaire qui ressemblait à un garçon boucher abruti et en pleine digestion. Elle lisait et lui ronflait. Parfait.

Maintenant que Gilbert savait qu'il pouvait abandonner des yeux ses doigts de pieds et y revenir, il tourna légèrement la tête et regarda directement la jeune femme. Puis il chuchota : "Pssssst... Mademoiselle ?". Gilbert, j'ai oublié de vous le dire, savait chanter. Il savait donc faire porter sa voix très loin. C'était un don qui lui avait souvent servi. Aujourd'hui, cette capacité à diriger sa voix là où il le voulait lui fut encore très utile. La jeune femme sursauta et leva les yeux de son livre. Elle regarda autour d'elle. Elle ne voyait rien, sauf ce gros monsieur là-bas, à une dizaine de mètres, qui la fixait des yeux. Elle leva les sourcils et le regarda aussi. Elle entendit alors, comme si c'était chuchoté à son oreille, ces mots très surprenants : "Oui, mademoiselle, c'est moi qui vous ai appelé. Pourriez-vous venir à côté de moi quelques instants, s'il vous plaît ? J'ai besoin de vous".

Olivia, car c'était son nom, dépassa vite sa surprise. Elle ne se demanda pas longtemps comment cet homme pouvait lui parler si doucement alors qu'il était si loin. Elle ne pensa pas que c'était une technique simpliste pour la draguer puisqu'elle était protégée par son mec, même s'il dormait. Elle ne pensa pas à la laideur immonde de ce gros monsieur. Elle se dit que la situation était suffisamment étrange pour aller voir ce qui se passait. Que risquait-elle, de toutes façons. En plus elle en avait un peu marre de ce recueil de nouvelles sans queue ni tête et elle avait envie de se baigner. Un petit détour par le gros monsieur ne lui coûterait rien.

Elle se leva et s'étira, puis marcha vers l'homme étrange. "Bonjour, que puis-je faire pour vous ?" dit-elle en s'accroupissant près de lui. L'homme la regarda quelques instants :

- Bonjour et merci d'être venue, Mademoiselle. Je voudrais que vous preniez une photo de moi, s'il vous plaît.
- Une photo ? Olivia sourit. Elle ne trouvait pas le gros monsieur très photogénique.
- Oui une photo. Mon téléphone est dans le sac, ici et je ne peux l'atteindre sans bouger. Je voudrais ne photo de moi dans cette position exactement.
- Ah ? Pourquoi pas ? répondit Olivia. Elle commença à farfouiller dans le sac de plage et trouva rapidement le téléphone. Un modèle dernier cri et plaqué or. Mazette, dit-elle !
- Oui, c'est celui-ci. Vous savez prendre des photos avec ? sourit Gilbert.
- Oui, j'ai le même... Enfin presque le même. Le mien n'est pas en or ! répondit Olivia en lançant l'application photo. Comment voulez-vous la photo ?
- Hum... En fait c'est un peu compliqué. Je voudrais une photo de mes doigts de pieds tels que je les vois en ce moment, avec la mer, les roches et le sable. Vous pensez que c'est possible ? demanda Gilbert le regard plein d'espoir.

Olivia regarda les doigts de pieds du gros monsieur et se figea instantanément. Ils étaient si beaux. On aurait dit un tableau peint par un ange. Olivia en eut le souffle coupé. Au bout de quelques secondes, Gilbert qui avait recommencé à regarder ses doigts de pieds, lui dit doucement "Respirez, mademoiselle. Ils sont beaux, n'est-ce-pas ?" Olivia resta immobile encore quelques instants, puis elle prit une grande inspiration. Elle réussit à opiner légèrement de la tête. Elle respirait à peine maintenant, comme si elle avait peur en bougeant de détruire l'harmonie du moment. Elle mit l'appareil photo devant elle, sans cacher la vue directe qu'elle avait de ces somptueux doigts de pieds. Puis elle se rapprocha lentement de la tête de Gilbert. A chaque centimètre, la vue des doigts de pieds était plus parfaite. Quand elle réussit à coller sa jour contre celle de Gilbert, elle comprit que les vues des doigts de pieds de l'homme qu'elle avait ressenti - c'est le mot - auparavant n'étaient que des ébauches par rapport à celle-ci. Elle poussa légèrement la joue de l'homme jusqu'à arriver au point de perfection ultime.

Olivia resta dans cette position plusieurs minutes. Son coeur battait la chamade. Elle se souvint ensuite qu'elle devait faire quelque chose, mais elle avait oublié quoi, quand elle entendit un léger chuchotement qui semblait venir de l'intérieur d'elle-même. "La photo", disait ce petit ruisseau sonore. Olivia se souvint alors et elle pressa le bouton. Une fois, deux fois... Elle eut même le courage de mettre l'appareil devant ses yeux pour avoir un maillure angle, perdant de vue pendant une seconde ces merveilleux doigts de pieds. Puis Olivia posa le téléphone et s'installa confortablement contre Gilbert sans quitter les orteils des yeux. Gilbert était heureux. Il ne s'était pas trompé sur le choix de la jeune femme.

Plus tard, à l'hôpital, quand Gilbert se réveilla, il ne se souvenait plus de rien. L'infirmière lui dit qu'il avait été amené ici en urgence suite à une altercation sur la plage. Gilbert ne se souvenait même pas d'avoir été sur la plage. Il avait été visiblement agressé par un vacancier fou de rage. On avait dû l'opérer en urgence. Le vacancier était boucher de son état et il avait apporté des couteaux sur la plage. Il semblait qu'il avait trouvé sa femme dans les bras de Gilbert et qu'il avait vu rouge. En plus, après avoir assommé Gilbert, à la demande de sa femme, il avait coupé les pieds de Gilbert avant que les CRS ne puissent intervenir. Mais Gilbert allait bien maintenant. Toutes ses affaires étaient là, à coté de son lit, même son téléphone en or.

Gilbert soupira. Quelle histoire absurde. De toutes façons il n'avait jamais aimé ses pieds. Comme le reste de son corps d'ailleurs. Il était assez riche pour se payer de parfaites prothèses de pieds. Au moins ça lui ferait une partie de son corps dont il pourrait être fier. Par acquit de conscience et pour voir s'il pourrait se souvenir de quelque chose, il ouvrit son téléphone. Quelqu'un s'en était servi et avait pris des photos avec ! Une bonne douzaine de photos de doigts de pieds boudinés, surexposées et floues. Aucun intérêt, se dit-il en les effaçant.

Les gens manquaient vraiment de goût !






samedi 16 août 2014

Et en Belgique il se passe quoi ?

En France, c'est calme. Week-end de bouchons sur les routes. François est content de sa belle commémoration dans le Var avec l'Afrique. Dossier spécial ici dans Var-Matin. La petite rentrée aura lieu dès lundi mais très petite. La France reste en vacances en ce long week-end. Il est donc temps d'aller voir ce qui se passe ailleurs. En Belgique par exemple.

C'est le week-end du grand tapis de fleurs à Bruxelles, sur la Grand Place, la plus belle de la ville. Tous les deux ans, les belges plantent ici pour le temps d'un week-end un immense tapis de fleurs. Vaut le détour si vous êtes dans le coin. Ca vous changera de la pluie. Les fleurs ont été plantées spécialement et ne poussent pas naturellement malgré la pluie, hein ! Voici le motif de cette année et une photo aérienne du vrai tapis. C'est beau, non ? C'est belge !




En Belgique également, mais à Dinant (avec un t) c'était hier la traditionnelle régate de baignoires, en hommage cette année à Adolphe Sax, Chevalier de l'Ordre de la Couronne de chêne, et inventeur du saxophone. Le chêne ça flotte. Le saxo ?


Et pour revenir à la guerre et faire un parallèle avec la France, la Belgique commémorait le 4 août le centenaire de son invasion par l'armée allemande. Belle photo de têtes couronnées (mais où est Léon Zitrone ???) à rapprocher de celle que j'avais publiée le 5 août ici. Plus glamour non ?


Il faudra m'expliquer un jour pourquoi les reines ou princesses portent toujours leur chapeau de travers et du même côté. On savait que les rois penchaient à droite, mais quand même !